À Fontaine, dans la presse locale, l’année 1968 semble avoir été une année comme une autre. La vie est rythmée par les jeudis de neige, la mi-carême à la maternelle des Carrois, les conférences proposées par la paroisse, les fêtes pascales, les communions, les confirmations, les mariages, la kermesse, la fête de la chorale l’Eau vive, le résultat du certificat d’études primaires, les nouveaux bacheliers, la sortie annuelle des pompiers, la fête du 14 juillet, le pèlerinage à saint Bernard, le passage du bâton du saint à un autre foyer, une opération brioche pour l’aménagement du centre médico-professionnel de Beire-le-Châtel, la commémoration de l’armistice du 11 novembre, l’arbre de Noël dans les écoles, le goûter des anciens.
Il faut lire les articles dans le détail pour trouver un écho de la contestation de mai 1968. C’est ainsi que le 10 juin, sous le titre « Succès sans précédent de la kermesse », on note qu’ « après plus d’un mois de tristesse et d’angoisse, les visages et les cœurs battant à l’unisson, se retrempaient enfin dans une ambiance saine et joyeuse ». Dans ses pages nationales, Le Bien public avait en effet dramatisé les événements de mai 1968. Des titres inquiétants et des photos spectaculaires montrant le résultat matériel des violences avaient fait peur. Aux élections législatives de juin, qui font suite à la dissolution de l’Assemblée nationale décidée pour répondre à cette crise de mai 1968, les électeurs fontainois infligent un revers cuisant au candidat de gauche qui perd plus de la moitié de ses suffrages par rapport aux législatives de l’année précédente. Les Fontainois votent majoritairement et de manière stable pour l’UDR Henry Berger, mais sans lui donner la majorité absolue car les voix qui allaient à la gauche se sont portées sur le centre droit. Henry Berger est néanmoins élu au premier tour dans sa circonscription.
Un autre indice de la crise de 1968 apparaît dans les délibérations municipales, où le maire signale les retards considérables pris par les nombreux travaux de voirie mis en chantier dans la commune, notamment l’élargissement de la rue du Faubourg-Saint-Nicolas et l’aménagement du carrefour des 5 rues, en raison des grèves et des intempéries. Malgré tout, les études confiées au cabinet d’architecture Guillaume et Pépin pour de nouveaux équipements communaux vont bon train. Cependant, entre les désirs légitimes et les possibilités réelles, il y a une marge car il faut trouver les financements, d’autant que les subventions de l’État diminuent fortement. Néanmoins, la préparation du futur domine, et un avis favorable est donné à la réalisation d’un centre administratif aux Carrois, comprenant la construction d’une école maternelle de quatre classes, de deux logements de fonction, d’un gymnase et d’une mairie moderne nécessaire à une ville de 10 000 à 12 000 habitants et qui, pour l’heure, en compte moins de 4 000. En attendant, une classe préfabriquée est mise en place. Aux Saverney, les pourparlers sont en cours pour l’extension de l’emprise du groupe scolaire et l’accord de principe est donné par l’autorité préfectorale pour la construction d’une école maternelle, ce qui ne signifie pas réalisation dans l’immédiat. L’agrandissement du cimetière est également mis à l’étude.
Pour ce qui est des réalisations, la quatrième tranche relative au réseau d’assainissement est lancée, tandis que pour l’alimentation en eau potable, des terrains sont acquis afin de construire la station de pompage, boulevard des Allobroges. Après la réfection de la toiture de l’église paroissiale, les murs sont ravalés. À l’école des Saverney, la cour est aménagée ainsi qu’un parking. Près de la mare, un petit coin fleuri et des bancs sont installés. 1968 voit aussi le début de la publication d’une revue municipale.
Dans le domaine économique, le centre commercial du faubourg Saint-Martin ouvre à l’issue des grandes vacances avec une agence de la Caisse mutuelle de dépôts et de prêts, un salon de coiffure pour dames, une droguerie-quincaillerie côté rue du Faubourg-Saint-Martin, une épicerie, une boucherie, une boulangerie, une mercerie-bonneterie et un tabac–presse côté rue du Faubourg-Saint-Nicolas. Au mois de décembre, le feu qui ravage les ateliers de la fabrique de meubles Mondia, boulevard des Allobroges marque les esprits.
Sigrid Pavèse