Un socle armorié offert par la famille Gruet au XVe-XVIe siècle

Le document permet de connaître la destination primitive d’un socle en pierre, qui servait à soutenir un buste de saint Bernard sculpté au XVIIIe siècle, lorsqu’il a été photographié, en 1972, dans la Maison natale de Saint Bernard par Michel Laignelet.

Cet élément sculpté, aujourd’hui introuvable, était à l’origine le support du tabernacle de l’autel de la Vierge situé dans le bras sud du transept de l’église Saint-Bernard de Fontaine-lès-Dijon. Offert par la famille Gruet, il reposait sur un autel de pierre du XVe siècle, auquel le curé Jules Richard, avait substitué, en 1888, un autel en bois néogothique, disparu depuis, qui avait été fabriqué à la colonie de Cîteaux[1].

Sur sa face antérieure, le socle porte un écusson armorié en relief. À la pointe de l’écu, une grappe de raisin est surmontée d’une serpe à talon disposée horizontalement. Il s’agit du « gouet » ou « gouy » qui a donné en diminutif « gouzotte ». Cet instrument servait et sert encore à faucher au ras du sol les « accrus », c’est-à-dire les racines d’arbre à la limite des cultures et des vignes[2]. Ces deux meubles sont la signature professionnelle d’une famille de vignerons. Au centre, entre les deux initiales, les conservateurs du musée du vin à Beaune ont identifié une potence, avec son tripode, qui pourrait être un engin de levage. Cette grue constituerait des armes parlantes de la famille Gruet dont on connaît un autre « calembour héraldique[3] »: « d’azur à la grue d’argent, membrée, becquée de gueules à la vigilance d’argent sur champ d’azur ». Ces armoiries figurent dans l’angle gauche d’un tableau[4] donné par la même famille au XVIIe siècle. Placé dans un retable au-dessus du même autel, il masquait alors la peinture murale du XVIe siècle représentant la Trinité que l’on voit aujourd’hui. Les initiales en caractères gothiques permettent de dater le socle de la fin du XVe ou du début du XVIe siècle. À droite, l’initiale G confirme que le donateur est bien un Gruet, sans que nous sachions avec certitude qui se cache, à gauche, derrière la lettre T à laquelle il manque la partie supérieure.

Élisabeth RÉVEILLON et Sigrid PAVÈSE.

[1] Mémoires de la Commission des Antiquités du département de la Côte-d’Or, tome XII (1888-1895), séance du 15 septembre 1888.
[2] « Le coupeur d’accrus », La Bonne nouvelle, bulletin de la paroisse de Gevrey-Chambertin, n° 304, mai 1980.
[3] CHABEUF, Henri, Mémoires de la CACO, tome XIII (1895-1900) p. CLXIII.
[4] Armoiries d’Anthoine Gruet dans  La remise du Rosaire à sainte Catherine de Sienne et saint Dominique, attribué à Philippe Quantin, huile sur toile, H : 189 cm x l : 152,2 cm, en dépôt au Musée d’art sacré de Dijon, Inv. D 966.6.2.1 et 2.

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